Samedi 03 novembre 2012, il est
13h 15. Je prends place, avec mon compagnon de route Frantz Calliste, dans un
car 80 places en partance pour Grand-Bassam. Déjà dans le car, on sent une
certaine ferveur : c’est déjà l’effet Abissa ou juste l’effet Grand-Bassam (ville balnéaire, première capitale de la Côte d’Ivoire
et récemment classée au patrimoine mondial de l’UNESCO) ? Une chose est sûre, en ce jour ensoleillé qui plus est, premier
samedi du mois, il y a bien mille et unes bonnes raisons de se rendre à
Grand-Bassam !
Après 1h de route et quelques
embouteillages, nous sommes à Grand-Bassam. Le temps du trajet qui nous conduit
de la gare au quartier Dialogue (avant le petit marché) où habitent nos hôtes
et du dit quartier à la place de l’Abissa (au Quartier France), nous nous
rendons vite compte de l’euphorie collective qui gagne la ville.
Chauffeur de Taxi en mode Abissa |
Frantz Calliste et une Bassamoise en partance pour le quartier France |
16h: nous arrivons à l’entrée du
quartier France avec nos hôtes comme guide. Un cordon de sécurité est déployé autour
du quartier rendant toute circulation impossible pour les véhicules. Nous devons
faire le reste du chemin à pied ! Tant mieux, on n’en sera que plus vite
plongé dans l’évènement.
Première impression : l’Abissa
est une fête vraiment ouverte à tous
Arpentant les rues du quartier,
nous pouvons constater l’affluence et la diversité des personnes venues
assister à l’évènement.
Aussi, si dans la plupart des
fêtes traditionnelles, le maquillage de kaolin, de par sa portée rituelle et
spirituelle, est réservé aux principaux acteurs de la fête (danseurs, voyants,
membres des générations ou des familles données), à l’Abissa le visiteur d’un
jour est-il invité à se fondre dans la masse : moyennant une pièce (peu
importe le montant, c’est le geste qui compte) vous ferez l’objet d’une séance
de maquillage en bonne et due forme !
Danseuse se préparant pour la procession royale |
Un Gbailleur maquillé mais serein! |
La singularité des rites et des
coutumes
Autant le visiteur est invité à se fondre dans la masse, autant est
il invité à respecter certains aspects de la coutume. En effet, après notre promenade, nous décidons
de nous rendre au cœur de l’évènement : la place Abissa.
Au terme du rang imposé pour
accéder à la dite place, on nous invite vivement à nous délester de nos
chaussures avant d’y pénétrer. Nous obtempérons gentiment : ne dit-on pas
que lorsque les habitants d’un village marchent sur la tête, il faut en faire
de même !
L’un des rituels les plus marquants
de cette fête fut certainement la critique sociale. En effet pendant que d’un
côté, le peuple dans un tourbillon frénétique danse au son de l’Edo n’gbolè (le
tambour sacré), les porte-parole des 7 familles constituant le grand peuple
N’zima adresse les récriminations et éventuels satisfecit de ces derniers au
roi et à sa cour.
Notons également que jusqu’à ce
que le tambour sacré s’arrête de tonner, aucune autre source de musique n’est tolérée
dans le village (entendez dans le quartier France). Quelle pourrait en être la sanction ? Je vous laisse
volontier faire votre expérience ! En tout cas, les tenanciers des maquis
montés pour la circonstance observent la prescription de façon méticuleuse.
Abissa : on s’amuse pas un
peu !!!
Suite notre incursion sur la
place Abissa pour le volet traditionnel de la fête, nous nous posons au maquis
« espoir » pour aborder la partie « off » de l’évènement,
il est 17h. Il faut dire qu’il s’agit de maquis montés expressément ou de
maquis plus connus dans la ville délocalisés pour l’occasion dans le village
sous des bâches en vue d’accueillir les visiteurs et certainement générer des
revenus pour le village.
Là, pendant que nous nous
restaurons et nous rafraîchissons, se déroule un spectacle peu orthodoxe :
celui des travestis. Ces derniers, tous aussi drôles les uns que les autres,
dans une parade quasi carnavalesque et conviviale, n’hésitent pas, à plaisanter
avec les visiteurs.
Cet homme...pardon cette femme enceinte cherche le metteur enceinte pour payer les consultations pré-natales! Notez son carnet de santé en main |
Cette mariée elle a été lâchée par son dulcinée qui l'a trouvait certainement un peu trop baraquée dans sa splendide robe! |
L’ambiance est tellement captivante que l’on ne se rend
compte ni du temps qui passe, ni de l’absence de musique (car rappelons-le, pas
de musique quand joue l’Edo N’gbolè !).
L’Abissa By night
21h : les cérémonies
traditionnelles prennent fin, commence alors un autre Abissa, «l’Abissa By
Night »!
Il faut dire que L’Abissa c’est
aussi et surtout le nouvel an N’zima, Il règne donc dans le village une
atmosphère digne des artères les plus chaudes de notre capitale économique. On
se rend compte que les danseurs d’Abissa sont aussi calés dans les rythmes en
vogues du moment (Kpankaka, Bouka bouéni, Nongon Nongon etc…) !
Mention spéciale au professeur
Awolowo qui par son œuvre éclectique, a offert aux profanes que nous étions (les
étrangers à la culture N’zima), les clés pour vibrer au même diapason que les
populations locales. Ses morceaux cultes comme "Vis à Vis" ou plus récents comme "Rouler Moutou" ou "Couvre Feu" (de son dernier album M23) sont repris en chœur dans tout le village,
élargissant la communion des N’zima à tout le microcosme social réunit pour les
festivités.
3h du matin : après une
longue nuit de fête, nous rentrons sur notre base pour compter les derniers
moutons de la nuit finissante. On nous informe qu’à 4h, se déroulera une
procession en fanfare dans le village. Un autre spectacle pittoresque à voir.
Mais autant les batteries de nos téléphones et de notre appareil photo
numérique sont à plat depuis plusieurs heures maintenant, autant sommes-nous
épuisés : la fanfare de 4h se fera sans nous !
Dimanche matin 9h, le réveil a été tardif. Suite au petit déjeuner royal qui nous a été offert (3 vrais poissons sols frits accompagnés d’attiekey et d’un piment à vous couper le souffle), une causerie s’engage avec nos hôtes sur les moments forts de notre séjour.
13h: c’est des souvenirs plein la
tête que nous décidons de prendre congé de notre fameux hôte, Monsieur Kpokpa
et de sa famille (car c’est d’eux qu’il s’agit), pour éviter de tomber dans l’embouteillage
monstre qui caractérise les fins d’Abissa nous a-t’on prévenu.
Ainsi pris fin notre Abissa. Conscients que nous n’eûmes l’opportunité de découvrir qu’une infime partie d’une culture qui a su préserver ses valeurs et ses rites tout en s’adaptant à l’air du temps, nous prîmes rendez-vous pour l’année prochaine, si Dieu le veut, pour plus d'émotions et encore plus de souvenirs, en espérant que vous serez du déplacement!
je veux finir ce compte rendu avec cette vidéo du magnifique paysage des plages de Grand-Bassam filmée dans le car lors du retour sur Abidjan, avec toujours en fond sonore du Meiway... décidément!
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